Jim Jarmusch And Anika

Jim Jarmusch n’a jamais vraiment séparé l’image du son. Il les laisse se frôler, se contredire, s’ignorer parfois. Avec Father Mother Sister Brother, il s’associe à Anika, prêtresse du spoken word spectral, pour composer une bande-son qui n’en est pas tout à fait une. On y entend des fragments, des silences habités, des nappes synthétiques qui s’étirent comme des souvenirs flous. “Jetlag” ouvre le bal avec une tension douce, presque clinique, où la voix d’Anika semble flotter au-dessus du réel. La reprise de “These Days” n’a plus rien de nostalgique : elle devient incantation, presque menace. Jarmusch gratte sa guitare comme s’il écrivait un haïku sur une nappe en papier, pendant qu’un piano électrique hésite entre deux accords. Le disque évoque un film qui aurait été effacé, ne laissant que la bande-son, les fantômes, et quelques noms griffonnés sur un carnet. Il ne raconte pas, il suggère.

pour prolonger l’écoute
John Cale – Music for a New Society
Grouper – Shade